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Lugovoy leva la tête de ses notes et dévisagea le neurologue de son équipe qui, installé devant la console, contrôlait les signaux télémétriques.

« Condition ? demanda-t-il.

— Le sujet est entré dans une phase de relaxation. Les rythmes cérébraux indiquent des cycles de sommeil normaux. (Le neurologue sourit.) Il ne le sait pas, mais il ronfle.

— J’imagine que sa femme, elle, doit le savoir.

— Je crois qu’elle couche dans une autre chambre. Ils n’ont pas eu de rapports sexuels depuis qu’il est revenu.

— Fonctions corporelles ?

— Normales. »

Lugovoy bâilla et regarda l’heure, Il était 1 h 12 du matin.

« Vous devriez aller dormir, docteur. L’horloge interne du Président le réveille entre six heures et six heures et quart tous les jours.

— Décidément, ce n’est pas une mission facile, grogna Lugovoy. J’ai besoin d’au moins deux heures de sommeil de plus que lui. Je déteste les lève-tôt. »

Il se tut, examina l’écran qui indiquait les paramètres physiologiques accompagnant le sommeil du Président et murmura :

« Il est en train de rêver.

— Ça doit être intéressant de savoir à quoi rêve l’homme qui dirige les Etats-Unis.

— Nous en aurons une vague idée quand l’activité de ses cellules cérébrales passera de schémas de pensées coordonnés à des abstractions décousues.

— Et quand dois-je commencer à programmer l’implant ? demanda le neurologue.

— Transmettez les instructions peu avant son réveil et répétez-les quand il sera installé à son bureau. (Lugovoy étouffa un nouveau bâillement.) Je vais me coucher. Appelez-moi en cas de modification brutale.

— D’accord. Bonne nuit. »

Lugovoy jeta un dernier regard sur les écrans avant de quitter la pièce.

« Je me demande ce qui se passe dans son esprit », fit-il d’un ton songeur.

Son assistant, désignant l’imprimante, répondit :

« Ça doit être là-dessus.

— Peu importe. Ça peut attendre demain », décida Lugovoy en se dirigeant vers sa chambre.

Sa curiosité aiguisée, le neurologue s’empara de la feuille de l’imprimante où s’inscrivait la traduction en clair des ondes cérébrales du Président. Il lut à mi-voix :

« Vertes collines en été. Une ville entre deux fleuves avec des églises de style byzantin surmontées de coupoles. Sainte-Sophie. Une péniche pleine de betteraves à sucre. Les catacombes de Saint-Antoine.

— Si je n’étais pas au courant, conclut-il pour lui-même, je penserais qu’il est en train de rêver de la ville de Kiev. »

II est au bord d’un chemin à flanc de colline qui surplombe un large fleuve. Il contemple le trafic fluvial, un pinceau à la main. Sur la pente boisée, il distingue en contrebas une statue de pierre drapée d’une robe qui brandit une croix comme un bâton. A sa droite, il y a une toile sur un chevalet. Le tableau est presque terminé. Le paysage qui s’étend sous ses yeux est fidèlement reproduit, jusqu’aux nervures des feuilles. La seule différence est dans la statue.

Le visage, au lieu d’être celui de quelque saint depuis longtemps tombé dans l’oubli, est celui du président du Soviet suprême, Georgi Antonov.

La scène change brusquement. Quatre hommes le tirent hors d’une petite maison. Les murs sont sculptés de motifs gothiques et peints d’un bleu éclatant. Les traits de ses ravisseurs sont flous. Il sent l’odeur aigre de leur transpiration. Ils le traînent vers une voiture. Il n’a pas peur. Il est furieux et se débat. Ses assaillants se mettent à le frapper. La douleur est lointaine, comme appartenant à quelqu’un d’autre.

Sur le pas de la porte, il aperçoit la silhouette d’une jeune femme. Ses cheveux blonds sont ramenés en chignon sur sa tête. Elle porte une blouse et une jupe de paysanne. Elle a les bras tendus et semble supplier, mais il n’entend pas ses paroles.

On le jette sur le plancher arrière de la voiture. La portière claque.

 

Panique à la Maison-Blanche
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